Stockage d’énergie : Comment la Suisse redéfinit les solutions durables pour l’Europe
La Suisse, pays réputé pour son esprit pionnier et sa conscience écologique, se positionne à l’avant-garde des solutions de stockage énergétique. MGS a examiné de près les avancées suisses, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y a beaucoup de révélations à faire.
En 2023, la part mondiale d’électricité produite à partir de sources renouvelables atteignait 30%, contre seulement 20% au début des années 2000. Une progression spectaculaire qui met en lumière la place prépondérante du stockage d’énergie dans la gestion des facteurs intermittents de ces sources vertes.
L’essentiel en trois points clés
- Les Alpes suisses : un réservoir naturel pour l’énergie renouvelable
Grâce à ses centrales de pompage-turbinage, la Suisse utilise l’excédent d’électricité pour stocker de l’énergie dans des réservoirs alpins, faisant du pays une « batterie verte » pour l’Europe. Cette infrastructure permet une gestion flexible des flux énergétiques face aux besoins changeants.
- Des innovations de pointe en stockage, de l’hydrogène aux batteries avancées
Outre les centrales hydroélectriques, la Suisse investit dans des technologies révolutionnaires comme celles d’Energy Vault, qui utilise des blocs de béton pour stocker de l’énergie, et dans des solutions de mobilité durable, avec la première flotte de camions à hydrogène et des stations de recharge.
- Un engagement dans la recherche sur les batteries du futur
La Suisse participe activement à l’initiative européenne Batterie 2030 pour améliorer les batteries lithium-ion et réduire leur dépendance aux métaux rares, consolidant sa place en tant que leader des solutions énergétiques durables et multimodales.
Les alpes suisses : un réservoir naturel d’énergie
La topographie unique de la Suisse lui confère un avantage considérable, notamment en termes de stockage d’énergie à grande échelle. Les centrales de pompage-turbinage, véritables batteries alpines, constituent la colonne vertébrale de cette stratégie. Ces installations ingénieuses utilisent l’excédent d’électricité pour pomper l’eau vers des réservoirs en altitude, la stockant sous forme d’énergie potentielle. En période de forte demande, l’eau est relâchée pour produire de l’électricité.
La Suisse compte actuellement une centaine de réservoirs hydroélectriques, dont une quinzaine équipés de systèmes de pompage. Ce qui distingue les installations suisses de celles des pays voisins, c’est la capacité supérieure de leurs bassins de rétention. Cette volumétrie accrue se révèle être le détail qui fait toute la différence. En effet, pendant les périodes de fonctionnement plus longues, on assiste à une meilleure flexibilité dans la gestion des flux énergétiques.
En juillet 2022, une nouvelle centrale de pompage-turbinage a d’ailleurs été mise en service dans le canton du Valais. Cette installation, l’une des plus puissantes d’Europe, joue un rôle déterminant dans l’équilibrage des fluctuations de l’énergie solaire et éolienne à l’échelle continentale. Elle illustre parfaitement le potentiel de la Suisse en tant que batterie verte pour l’Europe.
Mais il y a encore plus surprenant ! Le réchauffement climatique, bien que préoccupant, pourrait paradoxalement ouvrir la porte à de nouvelles opportunités. Le stockage hydroélectrique en serait l’un des premiers bénéficiaires. Et pour cause : la fonte des glaciers alpins libère des espaces propices à la construction de nouveaux barrages et lacs artificiels. Au gré des événements, la confédération helvétique pourrait renforcer davantage son positionnement comme hub énergétique européen majeur.
Des innovations disruptives made in Switzerland
Au-delà des solutions hydroélectriques traditionnelles, la Suisse se distingue par des approches novatrices en matière de stockage énergétique. La start-up Energy Vault, par exemple, a développé un concept révolutionnaire qui s’inspire du principe des centrales de pompage-turbinage, mais cette fois-ci, le procédé utilise des blocs de béton au lieu de l’eau.
Le système d’Energy Vault fonctionne de la manière suivante :
- En période de surplus d’électricité verte, des blocs de béton sont hissés pour former une tour de 120 mètres.
- Lorsque la demande en électricité augmente, ces blocs sont relâchés.
- La descente contrôlée des blocs actionne des générateurs, produisant de l’électricité.
- Ce cycle peut être répété indéfiniment et soutient une dynamique de stockage durable et efficace.
Le prototype mentionné a déjà suscité un vif intérêt à l’international. Une première usine inspirée de cette technologie a vu le jour en Chine, près de Shanghai, tandis qu’une seconde devrait être opérationnelle fin 2024 à l’ouest de Dallas, aux États-Unis. Un tel degré de sophistication témoigne de la pertinence et du potentiel global des alternatives suisses dans le domaine du stockage énergétique.
L’hydrogène : le carburant vert du futur
La Suisse ne se contente pas uniquement de casser les codes. Le stockage stationnaire de l’énergie n’est qu’un pan de sa stratégie multimodale ; l’autre volet s’attaque également au défi de la mobilité durable grâce à l’hydrogène vert. Les technologies « power-to-x » permettent de convertir l’électricité excédentaire en hydrogène, puis potentiellement en méthane. Le résultat débouche sur des économies tangibles.
En 2020, la Suisse a franchi une étape majeure en mettant en service la première flotte mondiale de camions commerciaux fonctionnant entièrement à l’hydrogène. L’initiative a été suivie en juin 2023 par l’inauguration de la première station de recharge d’hydrogène sur le réseau autoroutier suisse, près de Berne.
Comparaison : Hydrogène vs carburants fossiles
Caractéristiques | Hydrogène | Carburants fossiles |
---|---|---|
Émissions de CO2 | Nulles (si produit avec des énergies renouvelables) | Élevées |
Autonomie | Comparable aux véhicules à essence | Élevée |
Temps de recharge | Quelques minutes | Quelques minutes |
Dépendance aux ressources fossiles | Aucune | Totale |
Malgré ces avancées spectaculaires et prometteuses, la Suisse fait face à des contraintes de type structurel. L’absence d’une stratégie nationale claire et les incertitudes liées aux accords énergétiques avec l’Union européenne risquent de freiner le déploiement de l’hydrogène sur son territoire. Il paraît primordial que la Suisse puisse maintenir son esprit d’innovation. Cela passera par une dose de bonne volonté et un farouche désir de renforcer sa coopération internationale pour éviter de perdre l’avance qu’elle a accumulée dans ce domaine si stratégique.
Vers des batteries plus performantes et durables ?
La quête de solutions de stockage énergétique ne se limite pas aux grandes infrastructures. La Suisse participe activement à la recherche sur les batteries du futur, notamment à travers l’initiative européenne Batterie 2030. L’objectif est d’améliorer significativement les performances des batteries lithium-ion classiques, en termes de longévité et de densité énergétique, tout en réduisant leur dépendance aux métaux rares.
Le Laboratoire fédéral d’essai des matériaux et de recherche (Empa) concentre ses efforts dans ce sens. Corsin Battaglia, expert de l’Empa, souligne l’étendue de l’expertise suisse : « De la conception des matériaux à l’intégration des systèmes, en passant par l’électronique et le recyclage, la Suisse abrite de nombreuses entreprises à la pointe de la technologie des batteries, dont certaines sont des leaders mondiaux. »
Cette implication dans la recherche sur les batteries illustre l’approche holistique de la Suisse. En combinant des solutions à grande échelle comme les centrales de pompage-turbinage avec des innovations dans le stockage portable, la Confédération helvétique s’efforce de répondre à tous les aspects du dilemme énergétique actuel.
Des massifs alpins transformés en gigantesques batteries naturelles aux technologies de pointe dans le secteur de l’hydrogène et des megapacks, la Suisse confirme sa capacité à relever les enjeux complexes d’une réalité parfois sombre.